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Faire silence dans le monde anglophone aux XVIIe et XVIIIe siècles
APPEL À COMMUNICATIONS
COLLOQUE INTERNATIONAL ORGANISÉ PAR LA SOCIÉTÉ D’ÉTUDES ANGLO-AMÉRICAINES DES XVIIe ET XVIIIe SIÈCLES (SÉAA XVII-XVIII)
15-16 JANVIER 2016
Université Paris Diderot – Paris 7
Qu’ils soient récents ou plus anciens, les dictionnaires semblent éprouver des difficultés à définir le silence : « absence totale de sons ; le fait de s’abstenir de parler », selon l’OED, ou « s’opposant aux bruits, aux cris et au tumulte », d’après le dictionnaire de Phillips, New World of Words: Or, A Universal English Dictionary (1700), le silence ne pourrait s’appréhender qu’en creux, dans la relation qu’il entretient avec les sons ou la parole. Le silence ne se dit pas ; il s’impose. La sagesse populaire en vante les mérites : les hommes vertueux savent se taire tandis que les fats se répandent en paroles inutiles. La représentation traditionnelle des deux déesses romaines du silence, Angerona et Tacita, adresse un avertissement à celles et ceux qui ne sauraient pas se taire : la première est souvent montrée un doigt sur les lèvres, nous exhortant à faire silence, tandis que la seconde est représentée la langue arrachée en guise de punition pour excès de bavardage.
La Bible évoque le silence de manière ambiguë : le Psalmiste enjoint aux menteurs et aux calomniateurs de se taire mais presse Dieu de rompre le silence. Pour l’assemblée des fidèles, le silence peut être prélude à la réception de la Parole de Dieu, médiatisée par ceux qui en sont les dépositaires : les sermons de Paul comme ceux de John Donne possédaient, semble-t-il, la vertu de susciter le silence. Selon les mots de l’Ecclésiaste, il y a « un temps pour le silence, et un temps pour la parole ». On sait que, dans les communautés monastiques, le silence était une règle doublée d’un idéal de vie, quand le temps de l’action pouvait s’effacer devant celui de la contemplation.
Rompre le silence, toutefois, relève parfois d’une nécessité morale ou politique, quand il s’agit de déjouer des complots ou de dénoncer des méfaits. Garder le silence pourrait s’avérer plus dangereux ou plus condamnable que de parler. Quand la parole devient subversive, menaçant un certain ordre, imposer le silence s’affiche comme une préoccupation, parfois une obsession, institutionnelle : il s’agit alors de faire taire la dissidence politique ou religieuse et les voix discordantes. La répression de la parole jugée pernicieuse s’exerce de multiples façons, notamment par la censure.
Ce colloque a pour objet d’explorer, dans le monde anglophone des XVIIe et XVIIIe siècles, les manifestations du silence, entendu comme renoncement volontaire ou involontaire à la parole, dans différents champs scientifiques : littérature, arts, sciences, histoire religieuse et politique, histoire du livre. On s’efforcera d’étudier cette thématique dans une perspective dialectique pour tenter de comprendre comment s’articulent parole et silence. Le silence peut être renoncement volontaire quand, dans les sermons ou dans la poésie sacrée, il est prélude à l’intervention de la voix de Dieu. Il peut aussi résulter d’une prise de conscience de l’aporie du dire par le locuteur qui lui permet de questionner les codes rhétoriques et linguistiques de son temps. Il peut également être contraint par la censure qui entraîne parfois le locuteur vers des stratégies d’évitement et de contournement.
On pourra ainsi aborder, à titre indicatif mais non exclusif, les points suivants :
– silence et parole en science, en particulier dans les traités sur les passions ;
– silence et parole dans les traités rhétoriques (rôle du corps, éloquence muette) ;
– silence et parole dans les « commonplace books », les traités d’éducation et de bonnes manières, en relation notamment avec le rôle assigné aux femmes ;
– silence et parole dans les écrits religieux (sermons, exégèses bibliques, manuels de dévotion, etc.) et les pratiques spirituelles (d’essence catholique ou réformée) ;
– expression(s) et fonctions du silence en littérature : tropes, procédés stylistiques et modalités discursives (ellipse, aposiopèse, non-dit, mensonge par omission, etc.), marqueurs typographiques (ponctuation, page blanche) ; le silence comme jeu littéraire ;
– représentation et expression(s) du silence dans les arts : peinture, emblématique, musique ; paradoxe du silence qui se donne à entendre ;
– répression institutionnelle de la parole et ses effets : censure, autocensure, parole diffusée clandestinement, résistance ouverte ;
– silence et parole dans les rites politiques et sociaux.
Les propositions, en anglais ou en français, accompagnées d’une bibliographie sélective et d’un court CV, sont à envoyer en parallèle à :
Laurent CURELLY. Contact: laurent.curelly@uha.fr
Guyonne LEDUC. Contact: presidence@1718.fr
Pierre DEGOTT. Contact: secretariat@1718.fr
Date limite d’envoi des propositions : 24 avril 2015
Remise de la décision du comité scientifique : 26 juin 2015
CALL FOR PAPERS – INTERNATIONAL CONFERENCE
SOCIÉTÉ D’ÉTUDES ANGLO-AMÉRICAINES DES XVIIe ET XVIIIe SIÈCLES
(SÉAA XVII-XVIII)
15-16 JANUARY 2016
Université Paris Diderot – Paris 7
(Exact location to be specified)
Modes of Silence in the Seventeenth- and Eighteenth-Century Anglo-American World
Defining silence seems to pose a challenge to lexicographers in the contemporary period as it did in the early modern era. According to OED, silence is a “complete absence of sounds; the fact or state of abstaining from speech”, while Phillips’s New World of Words: Or, A Universal English Dictionary (1700) suggests that silence is “oppos’d to noise, crys and tumult”, as if silence could only be understood negatively in its relation to sounds or speech. Silence is ineffable; it imposes itself on us. It is celebrated by popular wisdom: virtuous men know how to keep silent whereas vain wits engage in endless prattling. The way the two Roman goddesses of silence, Angerona and Tacita, are typically represented can be read as a warning to all those who cannot remain silent: the former is often shown with a finger on her lips, urging us not to speak, while the latter is depicted with her tongue ripped off as a punishment for her garrulity.
The Bible presents silence in an ambiguous fashion: the Psalmist orders liars and slanderers of all stripes to be silent but begs God not to hold his peace. For the congregation silence is a prelude to the reception of the Word of God as mediated by those who have been entrusted with it: John Donne’s sermons, like Paul’s, it seems, had the power of imposing silence. Ecclesiastes says that there is “a time to keep silent, and a time to speak”. It is common knowledge that monastic silence was a rule of thumb as well as a living ideal, making it possible for contemplation to emerge from the exertions of an active life.
Not holding one’s peace, however, is sometimes a moral or political necessity, when it comes to thwarting conspiracies or denouncing misdeeds. In that case, silence is more dangerous or more reprehensible than speech. When speech becomes subversive and threatens institutional order and existing hierarchies, silencing political or religious opposition as well as dissenting voices becomes a priority for established authorities, sometimes even to the point of obsession. The repression of dissent is carried out in a number of ways, not least through censorship.
The aim of this conference is to explore modes of silence, understood as the voluntary or involuntary renunciation of speech, in the seventeenth- and eighteenth-century Anglo-American world. Various approaches covering a wide range of disciplines are welcome: literature, art history, history of religion, politics and science, history of the book. The organisers will especially value papers that study the dynamics of silence and speech. Silence may be a voluntary renunciation of speech when in sermons or sacred poetry it gives way to the voice of God. It may also result from the realisation that language is inherently flawed, thus making it possible for speakers to challenge the linguistic and rhetorical conventions of their time. Censorship may impose silence and may sometimes lead writers to try and elude or circumvent the censors.
Papers may address – though not exclusively – the following topics:
– -silence and speech in scientific books, notably treatises on the passions of the mind;
– -silence and speech in rhetorical treatises (role of the body, mute eloquence);
– -silence and speech in commonplace books, educational treatises, conduct books, notably regarding the place given to women;
– -silence and speech in religious writings (sermons, bible commentaries, handbooks of devotion, etc.) and spiritual practices (of a Catholic or Protestant nature);
– -expre–ion(s) and function of silence in literature: tropes, stylistic devices and discursive strategies (ellipsis, aposiopesis, covert messages, omitting truths, etc.), typography (punctuation, blank page); silence as a literary game;
– -representation and expre–ion(s) of silence in art: painting, emblem books, music; speaking silence;
– -institutional repression of speech and the effect this had: censorship, self-censorship, clandestine speech, open resistance;
– – silence and speech in political and social rituals.
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Proposals, plus a selective bibliography and bio-bibliographical CV, should be simultaneously submitted to:
Laurent CURELLY. Contact: laurent.curelly@uha.fr
Guyonne LEDUC. Contact: presidence@1718.fr
Pierre DEGOTT. Contact: secretariat@1718.fr
Deadline for abstract submission: 24 April 2015
Decision of the scientific committee: 26 June 2015